Coupe du Monde 2018 / Yaya Touré : « nous, les Africains, ne retenons pas toujours les leçons »

Par Yaniq BOKA

Si le Maroc, l’Egypte, la Tunisie et le Nigeria ne verront pas les huitièmes, Yaya Touré voit grand pour le Sénégal. 

« Les années passent et j’ai l’impression que nous, les Africains, ne retenons pas toujours les leçons. Pour exister en Coupe du monde, il ne suffit pas de se cacher derrière une ou deux grosses individualités. Avec la Côte d’Ivoire, je me souviens avoir déjà connu ça du temps de Didier (Drogba). Notre erreur était de tout miser sur notre «sauveur» en oubliant qu’une équipe ne pouvait pas fonctionner ainsi. Ça ne doit pas être «tous pour lui» mais «tous ensemble». Ce mode opératoire tourné vers un seul joueur fort pouvait peut-être suffire il y a encore une vingtaine d’années, mais désormais c’est suicidaire d’imaginer deux secondes pouvoir faire quelque chose lors d’un Mondial en misant tout sur un ou deux éléments. C’est valable pour toutes les sélections. Quand on voit les Argentins, on comprend vite… Messi ne peut pas tout faire tout seul. Mohamed Salah non plus… Ce qui est possible en Championnat, voire parfois en Ligue des champions, n’est pas transposable en Coupe du monde, où les espaces sont nettement moins nombreux. Les individualités, arrivées la plupart du temps émoussées après une saison à plus de cinquante matches, ne peuvent pas tout arracher, notamment sur ces phases de groupes qui peuvent servir de galop de remise en forme aux joueurs les plus éprouvés. »
« Pour moi, les difficultés des sélections africaines proviennent non pas d’un problème de qualité de joueurs mais plutôt d’une défaillance dans la réflexion. Au début du tournoi, les équipes africaines m’ont semblé manquer d’imagination, d’audace et d’intelligence dans la construction de leur jeu. Elles ont souvent été trop naïves (comme la Tunisie), trop prévisibles, trop attentistes aussi, en affichant des schémas et des organisations un peu stéréotypées. Heureusement, en avançant dans la compétition, elles ont affiché davantage d’intelligence collective. À commencer par le Maroc, qui, s’il a été la première sélection à être éliminée, a sans doute été celle qui a le mieux joué. Il y a des équipes qui vont se qualifier pour les huitièmes qui jouent moins bien que celle d’Hervé Renard, qui a surtout pâti de son problème de finition, trop visible pour s’en sortir. Le Nigeria, lui aussi, a fini par comprendre que la Coupe du monde n’était pas juste une belle vitrine pour se montrer, chacun de son côté. »
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