Au micro de Alphonse Camara, envoyé spécial du Comité National Olympique de Côte d’Ivoire (CNO-CIV), l’entraîneur Anthony Koffi parle des chances de médaille des sprinteurs Ivoiriens.

Coach Anthony, les épreuves de l’athlétisme aux Jeux de Tokyo débutent ce vendredi. Comment avez-vous préparé ce rendez-vous avec vos athlètes Marie-Josée Ta Lou et Arthur Cissé Gue ?

Le rendez-vous olympique se prépare sur plusieurs années. Pour cette olympiade, particulièrement, il y a la pandémie de la Covid-19 en 2020. Cela a bouleversé tout le système mais on s’est arrangé pour s’adapter. En 2021, la première phase de la préparation a été faite chez nous en Afrique. Plus particulièrement dans le Sud-ouest à Sassandra pendant un mois pour faire la préparation de base. Ensuite, nous sommes revenus à Abidjan sur nos bases pour faire la piste parce que Cissé devait faire les compétitions en salle. Cette deuxième étape s’est très bien passée. La troisième étape a démarré avec les premières compétitions de World challenge et de Diamond League.

Ils m’ont devancé en Europe où ils ont participé à ces compétitions. La phase terminale on devait la faire en Italie. Etant déjà en Europe, ils ne pouvaient plus retourner à Abidjan et repartir à nouveau en Europe. Et moi, j’étais bloqué parce qu’il me fallait un passeport de service. Avec la Covid, les chancelleries Européennes ne donnent plus de visa court séjour à moins que ce soit une mission. On a donc fait mains et pieds avec la direction générale des Sports et la directrice des sports de haut niveau pour que j’obtienne le passeport de service. Depuis la mi-juillet, je les ai rejoints en Italie où on a travaillé pendant trois bonnes semaines. Marie Jo nous a devancé parce qu’elle devait porter le drapeau de Côte d’Ivoire à la cérémonie d’ouverture. Voilà en gros comment nous nous sommes préparés.

 

Comment s’est effectué l’entretien des acquis à votre arrivée à Tokyo ?

En effet, ici, nous nous sommes attelés à faire l’entretien des acquis. Le seul handicap que nous avons eu il est purement individuel. Il faut que le corps s’habitue au décalage horaire parce que les heures de sommeil sont un peu perturbées. Nous avons travaillé par rapport aux heures des compétitions donc on s’est adapté. Pour le moment, tout se passe bien. Nos athlètes, je ne suis pas Dieu, mais ils sont bien. Cissé qui a eu trois semaines sans entrainement, se sent bien. On a pu rattraper les choses, il est à 98%.

Ce sont ses premiers Jeux, s’il arrive en demi-finale, il a les chances d’aller en finale. Avec ce que j’ai vu ce matin, je suis convaincu que la demi-finale, il devrait y arriver. L’état d’esprit des enfants est bon. Tu as vu tout à l’heure, quand Ta Lou sortait, elle a piqué l’enveloppe de Cissé. C’est dire qu’il y a cette ambiance familiale au sein du groupe. La ‘’vieille mère’’ (Ta Lou) comme nous l’appelons, cela fait 7 ans que je suis avec elle, je ne l’ai jamais vu aussi rapide à l’entraînement. On met tout dans la main de Dieu, je ne connais pas la forme de nos adversaires.

Mais aujourd’hui, vous avez six filles dans le monde qui ont le même niveau. Tout va se jouer aux nerfs, Au niveau africains, vous avez la Nigériane Blessing Okagbare, Murielle est arrivée, je ne la suis pas au quotidien donc je ne peux pas affirmer des choses mais vous connaissez Murielle, c’est une grande battante, c’est une professionnelle et il y a Ta Lou. Au niveau des autres continents, il y a les trois Jamaïcaines : Shelly Anne Frazer, Elaine Thompson et Jackson. La teigneuse petite anglaise Dina Asher Smith, et bien sûr une Américaine qui peut surgir. Voilà en gros, les six filles à 9O% d’où sortiront les trois du podium. Par rapport à l’expérience et leur niveau de performance.

Cette nuit, à partir de 3h13 TU (12h15 à Tokyo), Ta Lou et Murielle seront en lice pour le premier tour des séries. Et Cissé samedi. Comment voyez-vous l’issue de leurs courses ?

Pour les séries, je mets ma main au feu, les deux Ivoiriennes devraient les passer haut les mains. Cette année, le 100m dames sera l’une des épreuves les plus relevées par rapport au niveau de performance. Mais elles devraient passer les séries aisément parce que je vois à peu près la configuration. La qualification pour les demi-finales, sauf catastrophe, je crois qu’on devrait y arriver. Cissé entre en lice samedi. Vous savez au 100 m beaucoup de choses peuvent arriver.

Il y a la forme du jour, ma motivation. La seule chose que je crains chez Cissé, il ne faut pas que l’excès d’envie de bien faire tue la motivation. Là ce sont ses premiers Jeux, il a l’envie de prouver. S’il est trop excité, hyper motivé, il peut dormir dans le block, il peut tituber… Vous vous rappeler de ce qui s’est passé aux Jeux de la Francophonie à Abidjan en 2017 et aussi aux derniers Jeux africains à Rabat au Maroc. Avec les jeunes, c’est à ça qu’il faut faire très attention. Nous travaillons donc sur le mental, au niveau psychologique, la mise en confiance.

 

Au niveau du 100m hommes, Cissé sera quand même face à des adversaires de taille…

C’est l’épreuve où il y a plusieurs inconnus. Ce n’est plus la période où quand on vient, il y a Bolt et les autres. Aujourd’hui, ils sont tous au même niveau. Beaucoup de profanes regardent le ranking, mais c’est la forme du moment qui est importante. C’est l’épreuve où il y aura beaucoup d’inconnus. Il peut avoir beaucoup de surprises. Ils ont tous les mêmes niveaux. L’Américain Coleman n’est plus là, mais tous ceux qui sont présents ont le même niveau. Que ce soit les Africains, la Jamaïque, les Etats-Unis. Cette année, on n’a pas vu les Asiatiques courir mais ils ont beaucoup bossé. Le Japon et la Chine ont déjà deux ou trois coureurs à 10 secondes au 100m. Il faut compter aussi avec ceux-là.

Les Ivoiriens et les Africains fondent beaucoup d’espoirs sur vous, le savez-vous ?

Je salue tous les Ivoiriens qui prient pour nous, je félicite nos dirigeants même si le coach n’a pas profité. Mais pour une fois, les athlètes ont eu ce qu’il leur fallait pour se préparer. Et cela a été conséquent, il faut dire la vérité. Croisons les doigts, le plus beau reste à venir.

Sercom CNO-CIV