BAKY ÉCRIT – Retiré des terrains depuis l’été 2021, Bakary Meité profite de sa liberté retrouvée pour poser un regard libre, décalé et forcément engagé sur l’actualité du rugby. Aujourd’hui, il nous transporte en Afrique, où quatre nations préparent le Tournoi final de qualification à la Coupe du monde. Et comment elles constituent leur squad, à la recherche de leur diaspora en France…
En juillet prochain, les meilleures nations africaines s’affronteront sous le soleil de Provence pour la suprématie continentale et surtout pour un billet inestimable pour la prochaine Coupe du monde qui aura lieu en 2023 en France. Dans la poule de cette dernière !
Les quatre pays francophones – le Sénégal, l’Algérie, la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso – se sont donc mis en ordre de bataille pour se préparer du mieux possible. Pour cela, il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs. Et, donc, commencer par le commencement : la composition de leur squad respectif.
Chaque pays s’est donc lancé dans la recherche de joueurs ayant une ascendance qui lui permettrait de revêtir le maillot de l’équipe nationale concernée.
Prenons le cas de la Côte d’Ivoire, non pas par chauvinisme exacerbé mais plutôt parce que c’est le cas que je connais le mieux.
James Zié, ancien joueur international qui fait désormais partie du staff technique, utilise entre autres une démarche pour le moins atypique. Il consulte régulièrement le site de la FFR. Il plonge dans l’onglet compétition et parcours les divisions et les effectifs à la recherche de patronymes à consonance africaine. Si cette méthode peut prêter à sourire, elle ne s’en révèle pas moins efficace. Il a déjà réussi à identifier une demi-douzaine de joueurs qui évoluent de la Fédérale 2 à la catégorie espoirs.
Le bouche à oreille aussi tourne à plein régime. Les joueurs qui ont déjà eu les honneurs de la sélection sont les meilleurs VRP de la fédération. Ils vendent une ambiance exceptionnelle, qui est sans commune mesure avec celle du club. Le drapeau, l’hymne nationale et tout le toutim.
Il y a aussi ceux qu’on pourrait appeler les « faux-amis », mais qui sont en réalité de vrais frères. J’entends par là les joueurs ivoiriens qui n’ont pas de noms à consonance africaine.
Intéressons-nous au cas du pilier gauche international ivoirien Quentin Poupeau. Le capitaine de Saint-Médard-en-Jalles est au moins aussi ivoirien que moi, bien qu’il soit blanc et qu’il n’ait passé que quelques jours après sa naissance en Côte d’Ivoire. Juste le temps de sortir de la maternité abidjanaise avant de rallier la Gironde. Le droit du sol prévalant dans le droit ivoirien, la nationalité lui a été conférée de facto. Et quand il apprit dans un premier temps que sa Côte d’Ivoire natale jouait au rugby et qu’en plus, il était légitime pour pousser dans le pack des pachydermes, il se manifesta timidement.
L’histoire retiendra que Quentin appréhenda énormément son retour sur le sol ivoirien plus de 20 ans plus tard, allant même jusqu’à vouloir prétexter une quelconque maladie pour ne pas retourner sur la terre qui l’a vu naître. La peur de l’inconnu. Seulement voilà, dans l’ancienne colonie française, l’hospitalité n’est pas un vain mot. Un accueil mémorable lui fût réservé. Aujourd’hui, Quentin ne regrette pas son choix et languit chaque année de pouvoir rejouer avec le maillot des éléphants.
La couverture médiatique aussi y fait. Et la compétition dont on parle là risque d’être énormément suivie par les médias français, proximité géographique oblige. Cela pourrait aiguiser l’appétit de certains joueurs réticents de prime abord. La perspective de jouer une coupe du monde devrait pourtant se suffire à elle-même.
C’est tout le mal qu’on souhaite à toutes ces nations. L’heureux élu que les commentateurs ne se priveront pas d’affubler de l’épithète « exotique », aura fort à faire pour représenter dignement le berceau de l’humanité lors de la grand-messe du rugby mondial.