À 24 heures du coup d’envoi du TIDA 2025, un panel de cinq spécialistes a été organisé à l’INJS pour préparer les jeunes footballeurs aux réalités du football moderne : communication, discipline, construction de carrière, reconversion, santé et métiers connexes. Un rendez-vous riche en enseignements.
À la veille de la 10ᵉ édition du Tournoi International du District d’Abidjan (TIDA), qui s’est ouvert ce lundi 1er décembre sur le synthétique du stade Robert Champroux de Marcory, le comité d’organisation a initié un panel destiné à préparer les jeunes participants à la fois aux exigences du haut niveau et aux réalités parfois méconnues de la carrière footballistique. Cinq experts, issus de domaines complémentaires, ont partagé leurs expériences, leurs conseils et leurs mises en garde, dans un langage simple et concret, parfaitement adapté au jeune public présent à l’INJS.
Prince Akabla : “Vos réseaux sociaux doivent présenter le joueur que vous voulez devenir”
Le premier intervenant, Prince Akabla, manager du média Le Kpakpato Sportif, a ouvert les échanges en s’attardant sur un sujet central dans le football moderne : l’importance de la communication et de l’image. D’emblée, il a posé le cadre : « Comme l’ont dit M. M’Bahia et Mme Dechou, notre but n’est pas de briser vos rêves. Nous ne sommes pas là pour vous empêcher de devenir le prochain Neymar, le prochain Bissouma ou le prochain Yaya Touré. Mais il faut être réaliste : tout le monde ne pourra pas atteindre l’élite. Ceux qui sont encore scolarisés doivent connaître les métiers qui permettent de rester dans le football, même sans être sur le terrain. »
S’adressant directement aux jeunes, il leur a demandé de prendre conscience de l’importance de leur présence numérique : « Vous êtes jeunes et presque chacun d’entre vous possède un smartphone, souvent un modèle récent. La vraie question n’est pas ce que vous avez dans vos mains, mais comment vous l’utilisez. Être sur Facebook ou Instagram ne suffit pas. Votre communication doit refléter votre projet sportif. »
Prince Akabla a ensuite détaillé ce que devrait contenir la page d’un jeune joueur : « Montrez vos vidéos, vos entraînements, vos matchs, vos efforts. Évitez de publier tout et n’importe quoi. Limitez (ou supprimez) les contenus qui n’ont rien à voir avec votre ambition. Aujourd’hui, un joueur peut être repéré grâce à une vidéo bien réalisée. La question est : est-ce que vous produisez ce contenu ? Est-ce que vous vous valorisez ? »
Le journaliste a insisté sur la curiosité et la formation continue : « Vous avez accès à des analyses, des podcasts, des découpes vidéo, des témoignages de joueurs. Ce sont des mines d’apprentissage. Utilisez-les. Et lisez ! Même si vous n’aimez pas ça. La connaissance donne de la hauteur, et même si vous ne jouez pas en équipe nationale ou en Ligue des champions, vous pouvez rester dans le football, à condition de vous préparer. »
Maxime Gouaméné : “Le plus important, c’est ce que vous faites quand personne ne vous regarde”
Ancien international ivoirien et double champion de Côte d’Ivoire en tant qu’entraîneur, Maxime Gouaméné a rappelé à quel point le football moderne a évolué. « Le travail, ce n’est pas seulement ce que le coach vous montre à l’entraînement. Le plus important, c’est ce que vous faites chez vous, en dehors du terrain », a-t-il expliqué avec insistance. Il a dressé un parallèle entre son époque et celle des jeunes :
« Avant, pour qu’un joueur soit repéré, il fallait une cassette, des relations avec un président ou un agent. Aujourd’hui, tout tient dans un téléphone. Vous pouvez vraiment vous mettre en valeur si vous travaillez sérieusement. »
Pour Gouaméné, la discipline personnelle fait toute la différence : « Celui qui progresse, c’est celui qui travaille dans le silence, celui qui répète seul ce qu’il a mal fait à l’entraînement, celui qui analyse ses matchs, celui qui dort bien et mange bien. Un joueur qui ne s’entretient pas hors du terrain ne peut pas réussir au haut niveau. »
Emerse Faé : un témoignage puissant sur la reconversion et la résilience
Très attendu par les jeunes, le sélectionneur de la Côte d’Ivoire, Emerse Faé, a livré un témoignage intime sur son parcours, marqué par une fin de carrière prématurée et une reconversion exemplaire. « J’ai commencé le football à Nantes quand j’avais 10 ans. J’ai signé mon premier contrat professionnel à 19 ans, en 2003. Malheureusement, en 2012, j’ai dû arrêter ma carrière à cause de problèmes de santé. J’avais seulement 28 ans », a-t-il rappelé.
Il a décrit avec franchise ce moment difficile :
« À cet âge-là, on est encore jeune. J’avais encore de belles années devant moi, mais Dieu en a décidé autrement. Il fallait réfléchir vite, trouver un plan, apprendre un métier. Je ne voulais pas sortir du football, qui était ma passion. »
Faé a expliqué comment il a progressivement choisi la voie d’entraîneur : « J’avais déjà passé un premier diplôme par curiosité. Quand ma carrière s’est arrêtée, je me suis dit : ‘ Puisque j’ai commencé, je continue ’. J’ai alors passé tous les diplômes : jeunes, U17, U19, direction de centre de formation, puis finalement le CAF Pro, l’équivalent de l’UEFA Pro. »
Le champion d’Afrique 2023 a insisté sur la nécessité pour les jeunes de toujours anticiper :
« Sur 60 jeunes de ma génération, seulement 6 ont signé pro. Et pas tous n’ont fait une grande carrière. Pensez toujours à ce que vous allez faire après. La carrière passe vite. Une blessure peut tout arrêter. Il faut un plan B, même un plan C. »
Son message, empreint d’humilité, s’est conclu par un encouragement fort : « Je vous souhaite d’aller au bout de vos rêves. Battez-vous pour devenir professionnel, mais restez curieux. Et souvenez-vous : il existe des dizaines de métiers autour du football. Vous pouvez réussir, même sans être sur le terrain. »
M. Doumbia : “Le football ne se résume pas aux joueurs : des métiers entiers vous attendent”
Le consultant sportif M. Doumbia a élargi la réflexion en présentant les métiers connexes du sport, un sujet qui a captivé les jeunes. Il a décrit cinq métiers clés : Manager de carrière / agent sportif, régulé par la FIFA : « l’intermédiaire entre le joueur et le club » ;
Gestionnaire de performance : suivi technique et physique des athlètes ; Organisateur d’événements sportifs : compétitions, logistique, coordination ;
Responsable marketing sportif : valorisation du club, des joueurs et des événements ;
Gestionnaire de stade et d’infrastructures : un métier très recherché.
Il a également martelé : « Même si vous devenez footballeur professionnel, il faudra préparer la reconversion. Le bac, les diplômes spécialisés, les outils numériques… ce sont vos armes. »
Dr Yao : la médecine du sport, une voie d’avenir accessible
Le docteur Yao a exploré le volet médical, rappelant que les métiers de la santé sont essentiels dans le football :
Médecin du sport, spécialisé après 7 à 10 ans d’études de médecine ;
Secourisme sportif, formé aux gestes d’urgence ;
Spécialistes de la prévention des blessures.
« La théorie seule ne suffit pas. Il faut pratiquer, comprendre comment déplacer un joueur blessé sans aggraver une lésion, observer le match pour anticiper », a-t-il expliqué.
Son message central :
« Étudiez. Formez-vous. Le sport a besoin de médecins, de kinés, de secouristes. Vous pouvez rester dans le football autrement que par le jeu. »
Un panel riche, des messages forts, et une jeunesse attentive
Au terme des cinq interventions, les jeunes footballeurs sont repartis avec un message clair : le talent seul ne suffit pas.
La préparation, la curiosité, la discipline, la communication et l’anticipation sont les clés d’un parcours réussi sur le terrain comme en dehors.
À la veille du lancement du TIDA 2025, ce panel apparaît comme une étape essentielle pour bâtir une génération plus consciente, plus responsable et mieux armée pour affronter les défis du football moderne.