Coupe du monde U17 2025 : la FIF fait le bilan et fixe un cap clair pour l’avenir

Par Guy Jaures

La Fédération Ivoirienne de Football (FIF) a organisé ce mercredi 26 novembre une conférence de presse dédiée au bilan des sélections U17 filles et garçons, de retour des Coupes du Monde. Dirigeants, techniciens et sélectionneurs ont livré un état des lieux franc de la participation ivoirienne, entre satisfaction, frustrations et perspectives.

Une conférence très attendue pour clarifier les enjeux

C’est dans la salle de conférence de la Fédération Ivoirienne de Football que s’est tenue la rencontre, en présence d’Armand Gohourou, Directeur Exécutif de la FIF, du Directeur Technique National (DTN) Lounes Hattab, des sélectionneurs Bassiriki Diabaté (U17 garçons) et Koudougnon Adélaïde (U17 filles), ainsi que d’Armand Boli, responsable des sélections de jeunes. Les compétitions concernées se sont déroulées du 3 au 27 novembre pour les garçons, et du 17 octobre au 8 novembre pour les filles, ces dernières découvrant pour la première fois de l’histoire une Coupe du Monde. Les garçons, eux, signaient une cinquième participation.  Armand Gohourou a introduit les échanges en posant le cadre : « Nous sommes réunis pour dresser un bilan complet. Les sélections de jeunes sont un axe fondamental de notre projet technique. Il était important d’apporter des explications et de présenter les perspectives. »

Il a ensuite rappelé les bases de l’organisation interne de la FIF. « Dans notre structuration actuelle, les équipes A (masculine et féminine) ont leurs sélectionneurs propres et ne relèvent pas de la DTN. En revanche, toutes les sélections jeunes dépendent de lui. Les coachs Adélaïde (filles) et Bassiriki (garçons) travaillent donc sous son autorité. La FIFA a instauré une organisation annuelle des Coupes du Monde U17, ce qui exige une préparation continue de notre part. Nous avons réussi à nous engager dans cette dynamique et à participer aux deux tournois. Nos équipes sont revenues récemment, et il est temps de tirer un bilan constructif. » Cette entrée en matière a permis de contextualiser les difficultés rencontrées, notamment l’accélération des calendriers FIFA qui impose une mobilisation permanente des sélections jeunes.

Le bilan technique : entre satisfaction et axes d’amélioration

Le Directeur Technique National, Lounes Hattab, a ensuite apporté une analyse détaillée du parcours des deux équipes, revenant sur les défis rencontrés tant en préparation qu’en compétition. « Nous présentons aujourd’hui le bilan technique de nos deux sélections U17, garçons et filles, engagées lors de la dernière Coupe du Monde. Ce matin, nous avons eu une séance de travail avec les deux sélectionneurs et leurs staffs. Nous avons identifié les points positifs, malgré les résultats, mais surtout les axes d’amélioration. C’est cela qui compte dans notre logique de développement continu. Les Coupes du Monde de jeunes sont organisées chaque année par la FIFA et la CAF. Cela signifie que nous devons nous remettre en question chaque année et préparer, en permanence, de nouvelles générations de joueurs. Notre responsabilité est d’identifier les axes d’amélioration et de transformer ces constats en programmes et en plans d’action concrets. C’est ce que nous avons fait ce matin avec les staffs techniques. Notre volonté est claire : ne pas rester focalisés sur les résultats négatifs, mais utiliser l’expérience de cette édition pour progresser et renforcer notre projet de formation

En ce qui concerne les points positifs, Younès Hattab a reconnu que les résultats ne sont évidemment pas positifs, mais il faut surtout mettre en avant l’attitude des joueurs et des joueuses. Pendant toute la compétition, et pas seulement pendant les matchs, ils ont été attentifs, à l’écoute, respectueux du travail, et ils se sont comportés comme de véritables jeunes professionnels désireux de réussir. C’est important, même si les résultats n’ont pas suivi. Il a dit avoir noté les axes d’amélioration. Le premier concerne la préparation au très haut niveau. Il existe un écart important entre les compétitions locales, la phase UFOA B, puis la CAN, et l’écart est encore plus immense entre la CAN et la Coupe du Monde. Il faudra donc préparer les équipes avec un niveau d’exigence calibré pour le mondial. Cela commence par le processus de sélection, qu’il faut remettre en cause, puis par des préparations beaucoup plus adaptées. L’autre axe majeur, c’est le travail sur les staffs : les composer intelligemment, avec des gens capables de travailler ensemble pour tirer nos sélections vers le haut.

La polémique sur les joueurs non retenus

Concernant maintenant la question sur le changement entre les joueurs présents à la CAN et ceux qui sont finalement allés à la Coupe du Monde : « Il faut garder à l’esprit que nous devons prendre les meilleurs joueurs du moment. Ce n’est pas parce qu’un joueur a participé à la CAN qu’il doit automatiquement aller au Mondial, même s’il demeure éligible. Nous devons vérifier son état de forme et son état d’esprit. Je ne dis pas que nous avons écarté des joueurs pour cela, mais c’est un élément essentiel.», a clarifié Hattab. Prenant le cas des garçons, plusieurs joueurs clés se sont blessés à la veille du départ pour Dubaï, où la délégation a transité avant d’arriver à Doha. Des blessures sérieuses, qui ont changé des plans. Puis il y a les choix du staff : « une sélection, c’est vivant. Entre la CAN et la Coupe du Monde, il y a eu près de sept mois. En sept mois, l’état de forme change, les performances aussi, et les sélectionneurs voient de nouveaux profils émerger. Il serait injuste de penser qu’un joueur doit être pris simplement parce qu’il était là six mois plus tôt. », a-t-il ajouté.

Sur le même sujet, le sélectionneur Bassirki Diabaté a tenu à faire des clarifications, notamment sur la polémique des joueurs retenus pour Doha. « Nous avions des cadres blessés : Soro (latéral gauche, rupture des ligaments croisés), Diarassouba Dieudonné (rupture des ligaments croisés), Bamba Choilio (blessure aux adducteurs). Ensuite, des joueurs sans temps de jeu. Le cas Somé Adama. Au moment où la liste FIFA devait être déposée, le joueur ne jouait pas en club. Ironie du sort : il a été titularisé… le jour de la publication de la liste. Comment amener un joueur sans rythme en Coupe du Monde ? Si nous l’avions pris, on nous aurait attaqués pour cela aussi »

Une préparation compliquée par la simultanéité des compétitions

Le sélectionneur Bassiriki Diabaté a également tenu à replacer la performance globale dans son contexte. La Côte d’Ivoire a terminé dernière des dix pays africains engagés. Pourquoi ? « Nous avons priorisé la qualification pour la prochaine CAN, qui se jouait en même temps. Cette stratégie a réduit notre temps de préparation, mais elle a payé : nous sommes qualifiés, et donc toujours en course pour une nouvelle Coupe du Monde. » Il promet un travail profond sur l’organisation, afin d’améliorer la préparation dès la prochaine campagne. A la question de savoir, si le plan de développement inclut le suivi des jeunes ivoiriens à l’étranger, notamment l’appel des binationaux pour les compétitions internationales U17, le DTN a déclaré ceci : « Nous préparons les sélections à partir de l’U15. En U15 et U17, je pense qu’il faut prioriser les joueurs locaux, car nous les détectons très tôt, de l’U12 à l’U15. Il est logique de leur faire confiance. À partir de l’U20, on regarde progressivement du côté des jeunes expatriés, à condition qu’ils aient les qualités, l’état d’esprit et le profil correspondant aux besoins du sélectionneur. Si un ivoirien en Europe a le bon profil, nous ne nous interdisons absolument rien. L’important est la communication. Lorsqu’il n’y a pas de dialogue avec les jeunes binationaux, il y a un risque de les perdre. Nous devons leur présenter notre projet, notre vision, notre logique de sélection. »

 

« Il faut être exigeant, mais aussi patient et réaliste. », Armand Gohourou

Pour le Directeur Exécutif de la FIF, Armand Gohourou, les Ivoiriens doivent être exigeant, mais ils doivent être aussi patient et réalistes. Pour lui, il faut replacer les choses dans leur contexte. Selon lui, le Comité Exécutif actuel est arrivé dans un contexte où la Fédération sortait d’une longue crise. Il n’y avait plus de compétitions jeunes depuis des années et les moyens étaient quasi inexistants. « Le véritable travail n’a commencé qu’après la CAN 2023 (jouée en 2024), grâce aux ressources générées par l’organisation. Le DTN n’est en fonction que depuis février 2024. Les compétitions jeunes coûtent extrêmement cher, parfois plus d’un milliard au niveau régional. C’est seulement maintenant que ces investissements sont possibles. En moins d’un an, nous sommes allés à la Coupe du Monde. Le Maroc, champion du monde, travaille sur ses jeunes depuis 2007. Cela fait plus de quinze ans ! Nous, cela fait tout juste quelques mois.»

Au terme des échanges, la FIF a affiché un discours cohérent : lucidité sur les limites, responsabilité assumée, mais surtout volonté de bâtir durablement. La participation simultanée des U17 filles et garçons à une Coupe du Monde reste un symbole fort du renouveau du football des jeunes en Côte d’Ivoire. L’organisation annuelle désormais imposée par la FIFA rend le défi permanent, mais aussi les opportunités plus nombreuses. À travers les propos entendus, une conviction ressort : la Côte d’Ivoire avance, et cette génération, malgré les difficultés, constitue une étape décisive dans la nouvelle histoire de la formation ivoirienne.

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