Trente-sept ans après sa dernière organisation, le Maroc accueille de nouveau la Coupe d’Afrique des Nations. Dix ans après avoir refusé la CAN 2015, le Royaume chérifien revient sur le devant de la scène continentale avec une ambition claire : soulever enfin un trophée que tout un peuple attend depuis près d’un demi-siècle. Favori annoncé de cette 35e édition, le Maroc est-il prêt à assumer son statut ?

Du refus de 2015 à l’omniprésence africaine
Il y a dix ans, le Maroc aurait pu accueillir la 30e édition de la Coupe d’Afrique des Nations. Mais à quelques semaines du coup d’envoi, Rabat se rétractait, invoquant le risque sanitaire lié à l’épidémie d’Ebola qui sévissait alors en Afrique de l’Ouest, notamment en Guinée et en Sierra Leone. La CAF sanctionnait le Royaume, avant de confier l’organisation en urgence à la Guinée équatoriale. Depuis cet épisode douloureux, le Maroc a profondément rétabli et renforcé ses relations avec la Confédération africaine de football. Mieux encore, il est devenu un acteur central de l’organisation des compétitions CAF : CHAN, CAN U17, U20, U23, CAN féminine, sans oublier cette CAN 2025.
Portée par une forte volonté politique impulsée par le Roi Mohammed VI, cette stratégie a permis au Maroc de s’imposer comme une référence structurelle et organisationnelle du football africain. C’est donc fort de lourds investissements et d’infrastructures de pointe que le pays accueille, avec fierté, la 35e édition de la CAN, 37 ans après.
1988, un souvenir encore amer
En 1988, le Maroc avait organisé la 16e édition de la CAN, alors disputée à huit équipes. Après 16 matchs, le Cameroun s’était adjugé son deuxième titre continental, éliminant les Lions de l’Atlas en demi-finale. Une immense désillusion pour le pays hôte. Cette fois, la CAN se joue à 24 équipes, un format adopté depuis quatre éditions. Et jamais le Maroc n’a semblé aussi armé pour aller au bout. Peut-être est-ce enfin l’année ou jamais.
Favori naturel… mais sous pression
Numéro 1 africain et 11e mondial au classement FIFA, le Maroc arrive à cette CAN avec l’étiquette de grand favori. Pays hôte, effectif pléthorique, encadrement technique expérimenté : tous les voyants semblent au vert. Emmenée par le Ballon d’Or africain 2025 Achraf Hakimi et dirigée par Walid Regragui, dont l’expérience s’est enrichie depuis l’épopée historique au Mondial 2022 (4e place au Qatar), la sélection marocaine impressionne sur le papier. Bono, Brahim Díaz, Noussair Mazraoui, Romain Saïss et consorts devront cependant assumer la pression d’un public exigeant.
Car si le Maroc brille souvent sur la scène mondiale, sa relation avec la CAN demeure ambiguë. Éliminé en quart de finale en 2021 au Cameroun puis en huitièmes de finale en 2023 en Côte d’Ivoire, le Royaume peine à confirmer son statut continental. En 19 participations, il ne compte qu’un seul sacre, obtenu en 1976 en Éthiopie, et une seule finale disputée depuis, en 2004 en Tunisie. S’y ajoutent une troisième place en 1980 au Nigeria.
Une poule A loin d’être anodine
Avant de rêver au trophée, le Maroc devra d’abord franchir l’obstacle du premier tour. Logé dans le groupe A, le pays hôte n’a pas hérité d’une poule de tout repos. Les Lions de l’Atlas lanceront leur tournoi ce dimanche 21 décembre à 19h, au stade Prince Moulay Abdellah de Rabat, face aux Comores. Pour leur deuxième participation, les Cœlacanthes, 108es au classement FIFA, restent dans les mémoires après leur parcours sensationnel en 2021 au Cameroun, ponctué par une qualification historique pour les huitièmes de finale. Sous la houlette de l’Italien Stefano Cusin, ils rêvent de rééditer l’exploit.
Le Mali, l’obstacle majeur
Lors de la deuxième journée, vendredi 26 décembre, le Maroc affrontera le Mali dans un choc qui pourrait déjà s’avérer décisif. Pour leur 14e participation, les Aigles poursuivent inlassablement le rêve d’un premier sacre continental. Finalistes en 1972, demi-finalistes à cinq reprises entre 1994 et 2013, troisièmes en 2012 et 2013, les Maliens disposent d’une génération talentueuse emmenée par Yves Bissouma. Ils voudront effacer la cruelle élimination subie face à la Côte d’Ivoire lors de la CAN 2023 à Bouaké. Même sans le statut de favori, le Mali demeure un outsider redoutable.
La Zambie, l’invitée imprévisible
Dernier adversaire du Maroc dans cette poule A, la Zambie reste une équipe à ne jamais sous-estimer. Vainqueurs surprises en 2012, les Chipolopolo disputeront leur 19e CAN. Leur histoire avec la compétition est riche : finalistes dès leur première participation en 1974, ils terminent également sur le podium en 1982, 1990 et 1996.
Fait notable, la Zambie s’est souvent illustrée en Afrique du Nord, atteignant notamment la finale en 1994 en Tunisie. Après leur sacre de 2012, les Zambiens ont connu des années plus difficiles, avec plusieurs éliminations précoces (2013, 2015 et 2023) et des absences notables (2017, 2019 et 2021). Mais leur capacité à surprendre reste intacte.
Un rendez-vous avec l’histoire
Avec le soutien de tout un peuple, des infrastructures modernes et l’une des meilleures sélections du continent, le Maroc se présente à cette CAN 2025 avec une opportunité rare. Reste à savoir si les Lions de l’Atlas sauront transformer leur immense potentiel en victoire continentale.
Après 49 ans d’attente, le Maroc n’a jamais été aussi proche. Peut-être, enfin, l’année où jamais.